NOHA
Interview avec Dorian Fournier, le fondateur d'A.D.N.,réseau d'agents immobiliers diplômés notaires
Vous avez peut-être déjà vu ses vidéos Youtube : Dorian Fournier n’a pas peur de prendre la parole sur les réseaux sociaux. Nommé notaire salarié à seulement 25 ans, il décide quelques années après de créer son agence immobilière à Bordeaux. Mais il ne s’arrête pas là : il décide également de prendre la parole sur les réseaux et plus récemment, il créé A.D.N : le premier Réseau composé d’Agents Diplômés Notaires. Bien loin des clichés qui collent à la peau des notaires, mais aussi aux agents immobiliers, Dorian a accepté de se livrer sur son parcours et son réseau pour Noha-Notaires. Et pour la première fois sur Noha-notaires, nous vous proposons un article sous format écrit que vous pouvez également retrouver en format vidéo Youtube !

Salut Dorian ! Est-ce que tu peux te présenter rapidement pour ceux qui te découvrent aujourd’hui ?
Avec plaisir. Je m’appelle Dorian Fournier, et j’ai été nommé notaire salarié très tôt. J’ai été nommé à 25 ans. J’ai exercé pendant presque 3 ans dans une étude historique à Bordeaux. Si j’ai adoré le métier, et je l’adore toujours, quelque chose ne me satisfaisait pas entièrement. Clairement, les conditions de travail ont beaucoup pesé sur ma satisfaction en tant que notaire ! Comme pour beaucoup d’employés du notariat, je n’ai pas fait exception. Dans le notariat, il y a son lot d’aspects négatifs dans le métier et dans les conditions de travail. Finalement, j’ai opté pour l’épanouissement personnel et cette volonté que j’avais d’entreprendre pour mieux servir le notariat, mais – et ça peut paraitre contre-intuitif - de l’extérieur. Et ça, je pense que c’est quelque chose que tes lecteurs peuvent comprendre.
Bref, c’est avec ce constat et ces objectifs en tête que j’ai créé mon agence, Juridic-Immo, à Bordeaux. Il n’aura pas fallu un an pour que la vie m’apporte deux associés, aussi géniaux l’un que l’autre. Ils sont aussi très différents, et ça, dans notre association, c’est ce qui change les choses. C’est donc fort de ces deux associés qui m’accompagnent que nous avons créé le Réseau ADN.
La relation entre les agents immobiliers et les notaires est parfois compliquée. Quelle image des agents immobiliers avais-tu quand tu étais notaire ?
Alors, « compliquée », c’est un euphémisme ! J’ai envie de te répondre, « ouais, c’est pas faux ! ».
Pour répondre strictement à ta question, et ça risque de paraître bizarre, mais je voyais l’agent immobilier comme un moindre mal. Je sais que ça va faire grincer les dents dans le notariat. Je m’explique.
Très clairement, la transaction immobilière est un agrégat de connaissances très diverses et nécessitant beaucoup de technicité. Pour ma part, je crois fermement que toutes les émissions de télé immobilières tournant autour de la mise en vente ou de la recherche de biens, le homestaging etc. tronquent la réalité et masquent le quotidien de ce métier. Mais en même temps, comment reprocher à Monsieur et Madame Toutlemonde d’y croire ?
C’est peut-être une déformation professionnelle liée à ma formation – on a quand même fait 7 ans de droit, ça formate – mais je ne pouvais que constater et déplorer que les intermédiaires immobiliers avec qui je traitais, ceux qui apportaient les dossiers au notaire, manquaient très souvent de formation. L’analyse juridique qu’ils faisaient des dossiers était loin de la vérité et on ne pouvait pas ne pas passer après.
Malgré tout cela, je préfère encore l’intervention d’un professionnel en intermédiaire plutôt qu’une vente qui se serait fait entre des non-professionnels dans leur coin. Ces ventes, pour les notaires, ce sont les pires. Donc, si je dois résumer, tant que les transactions entre particuliers ne seront pas devenues un phénomène à la marge, je serais du côté des agents immobiliers.
Très concrètement, quelles sont les premières étapes à suivre pour devenir agent immobilier lorsqu’on est diplômé notaire ?
Si mon associée Mélissa était là, elle te dirait que pour déterminer si un conseil est un « bon conseil », il faut qu’il soit passé au tamis de ses propres intérêts. Je vais m’expliquer, mais juste avant de rentrer dans le vif du sujet, une petite précision ! Je suis dans le cadre légal de l’agent immobilier, donc soumis de ce fait à la loi Hoguet. Cela dit, dans le cadre du Réseau A.D.N, nous avons l’ambition de proposer un service bien différent de ce que font les agents immobiliers.
Alors, je ne vais pouvoir te répondre qu’à la seule question à laquelle je suis légitime de répondre : Comment devenir un Agent A.D.N ?
Le métier d’agent A.D.N., c’est le seul métier qui a été pensé, développé et organisé pour les diplômés notaires. Pour qu’ils puissent être à la fois épanouis dans leur travail et pour qu’ils puissent vraiment faire valoir leur expertise incomparable. Donc :
Premièrement, je crois qu’il faut réaliser un travail d’introspection. Si ça ne te « travaille » pas tous les jours -la nuit même ! - alors c’est que ce n’est pas pour toi. Tu n’es pas encore mûr.
Deuxièmement, et ça c’est dommage mais c’est bel et bien le cas, il faut avoir vécu des expériences un peu désagréables dans les études qui te poussent à te dire que ça ne peut plus continuer comme ça.
Troisièmement, la seule chose à faire, c’est de me contacter car le Réseau A.D.N. c’est le premier et le seul réseau en France qui accueille des agents qui sont titulaires du diplôme de notaire, et uniquement ceux-ci.
Lorsque tu as pris la décision de changer de métier, de passer de notaire salarié à agent immobilier, quelle a été la réaction de tes proches (amis, famille,…) ?
La question est évidemment à poser ! Pour moi, le processus de décision a été assez lent car j’ai dû faire le deuil de ma carrière de notaire. Ce sont les aspects désagréables du notariat qui ont fini par peser sur ma décision de quitter le notariat. Pour rentrer dans quelque chose d’assez personnel, j’ai été marié jeune, la même année que ma nomination en tant que notaire, et j’ai divorcé très rapidement. Ma vie de couple a clairement pâti de mon implication, peut-être excessive, dans ce métier que j’adore et qui est un très beau métier. Mais… Est-ce que ça valait vraiment ce sacrifice ?
Pour être honnête, ma famille et mes proches n’ont pas été tout de suite très réceptifs à cette annonce. Mais bon, je m’y attendais. En même temps, comment veux-tu faire toucher du doigt à tes proches - proches dont la mission est de te protéger, de te guider vers ce qui est le mieux pour toi- toute la souffrance accumulée en silence ?
Comment justifier de laisser tomber une carrière qui va être considérée comme enviable et avec un salaire considéré comme confortable pour au contraire se diriger vers la profession d’agent immobilier qui souffre d’une certaine défiance aux yeux du grand public ?
Forcément, on se retrouve dans une situation de grand écart social digne de Jean-Claude Van Damme ! Plus sérieusement, les candidats qui nous sollicitent savent que nous les comprenons parfaitement. Nous leur apportons tout le soutien dont ils ont besoin dans ces moments de turbulence et de doute, y compris familial.
Comment décrirais-tu ta nouvelle relation avec les notaires ?
C’est une question fondamentale car je suis passé par plusieurs phases. La première d’entre elles, ça a été la phase de scepticisme pour certains, et même d’incompréhension pour d’autres et disons-le d’une forme de mépris. C’est comme si je passais du côté obscur de la force !
Pour te répondre très clairement, il faut que je distingue ici mes deux rôles : celui d’agent et celui de directeur du Réseau A.D.N. En qualité de « simple » agent immobilier, certaines choses sont à la fois très simples dans les relations avec les notaires, car nous parlons le même langage et nous avons des réflexes communs, alors que d’autres restent des sujets d’incompréhension mutuelle.
Globalement, ça se passe « pas trop mal » et je crois surtout qu’avec le temps et la montée en puissance du Réseau, l’Agent A.D.N trouvera pleinement sa place. Les relations avec les notaires vont devenir idéales.
Avec mes deux associés, nous avons un partage des fonctions qui est très clair. Dans ce partage de fonctions, ils m’ont poussé à prendre celle de figure de proue du Réseau A.D.N. Cela implique que je m’expose sur les réseaux sociaux et je pense que nous allons en parler, mais aussi que j’aborde des sujets, tant sur le fond que sur la forme, que mon autre associé Vincent, aime appeler « poil à gratter ».
Donc, les notaires restent des hommes et des femmes qui, face à quelque chose de nouveau, adoptent les postures classiques : certains nous ignorent, d’autres nous critiquent, nous combattent parfois aussi, mais de manière plutôt indirecte et feutrée, pour le moment. Et, au contraire, certains, ou devrais-je dire certaines, car la majorité des notaires qui sont conquis par notre projet sont des femmes, sont très enthousiastes. Et comme l’aurait dit un grand philosophe, joueur de foot à ses heures : « La routourne va tourner ».
Plus sérieusement, pour conclure, les notaires à qui Vincent enseigne la Méthode A.D.N, sont littéralement conquis et dès qu’elles ouvrent les yeux, absolument tout se débloque et s’accélère.
Est-ce que ta communication avec les notaires est plus fluide car tu es toi-même diplômé notaire ?
Encore une fois, c’est une réponse à deux vitesses !
On a, d’un côté, les notaires « à l’ancienne » qui n’ont pas encore pris le virage du « service client » et même parfois du numérique avec un combo dévastateur qui est d’avoir loupé les deux virages de ce siècle. Ils ne peuvent donc pas admettre ce que nous faisons !
Et il y a ceux qui sont dans la confidence, ceux-là sont des vrais partenaires avec qui tout, absolument tout, est fluide. Parce qu’au final, notre ambition avec le réseau A.D.N. c’est que la transaction redevienne ce qu’elle aurait dû rester : De la joie dans la sérénité… pour toutes et tous.
Après avoir été notaire, tu es désormais agent immobilier. Quelle est la relation avec les clients que tu préfères et pourquoi ?
Alors, agent A.D.N. ! Encore une fois, je vais devoir préciser la notion de « client » avant de pouvoir te répondre pleinement. Vu de ma fenêtre, les notaires n’ont pas tant de « clients » que cela ! Beaucoup, et encore beaucoup trop d’après moi, pensent « dossier ». C’est leur prisme et comme pour les agents immobiliers, comment leur en vouloir ?
Avant que certains esprits chagrins ne t’inondent de messages injurieux et outragés, je vais préciser et nuancer ce qui pourrait apparaître, aux yeux de personnes un peu obtuses, comme de la provocation. Je suis convaincu que ce sont les mots qui véhiculent les idées, les concepts et pas l’inverse. Dans une étude, on parle, depuis des centaines d’années et du soir au matin, de dossier, par exemple le « Dossier MARTIN/DURAND ». On ne parle pas des « clients » MARTIN et des « clients » DURAND mais bien de l’ensemble des pièces nécessaires à la perfection d’un acte authentique de vente qui se devra de refléter et de transcrire la volonté des parties. Et c’est le tunnel de réalité du notariat, qui est de réunir l’ensemble des pièces nécessaires à un dossier pour aboutir à la signature d’un acte authentique.
Je n’ai jamais entendu parler d’une étude dotée d’un « service client » alors que même les opérateurs téléphoniques, qui maltraitent leurs propres clients à longueur d’année en ont un !
En revanche, en qualité d’Agent A.D.N, là, nous avons des clients et je connais chacun d’eux. Parce que justement, cela me manquait dans le notariat, et parce que dans ma nouvelle profession, c’est nécessaire et pas considéré comme déplacé ou une perte de temps.
Parce que j’aime rencontrer les gens, tout simplement et pas juste échanger des pièces. Et parce que la réussite de mes clients, c’est aussi la mienne, et cela crée des connexions fortes.
Avec le Réseau A.D.N, nous avons l’ambition de faire vivre une expérience client 5 étoiles. Alors, oui, j’ai des clients et je les chouchoute.
Est-ce que certains aspects du notariat te manquent ?
Non, aucun. Qu’est-ce qui pourrait me manquer ? Les horaires à rallonge, le stress, l’usure physique et mentale, l’absence de sens à cette course effrénée ?
En fait, pour ma part, j’ai eu la chance de travailler avec des notaires qui, tant sur le plan professionnel que personnel, étaient des gens bien, des belles personnes. Mais à côté de ça, et là le secret professionnel m’interdit de révéler leur identité, certains diplômés notaire nous ont fait des confidences et nous ont raconté des horreurs ! Entre l’absence de considération qui semble être la norme, l’absence de gratification et de reconnaissance des efforts fournis, les propos dégradants tenus d’ailleurs souvent par des patrons hommes envers les femmes et je passe certains aspects pas franchement ragoûtants, je crois que je vais m’arrêter là avant d’avoir des ennuis.
Donc, si à moi qui ai vécu un notariat sans « trop » de souffrance, le notariat ne me manque pas, j’imagine ce que cela doit pour ces clercs et diplômés notaires qui eux ont vraiment souffert, beaucoup pour certains !
Ton diplôme de notaire est-il un argument de vente dans ta profession d’agent ?
D’Agent A.D.N… Je complète ! Je t’avoue qu’à mes débuts, j’ai commis l’erreur de penser que c’en était un ! Depuis, j’ai appris deux trois choses qui font que non seulement, j’ai changé de paradigme, mais surtout j’ai compris pourquoi c’était une double erreur de l’utiliser tel quel. Mais comme un bon magicien ne révèle jamais tous ses tours, je ne vais pas m’étendre sur ce sujet, mais ce que je peux te dire, c’est qu’une fois que tu as compris pourquoi, cela change tout !
Comment en fais-tu une vraie force ?
Je suis partagé entre mon envie de partager tous les secrets de la réussite et la nécessaire protection d’un savoir-faire unique en France. D’ailleurs, les candidats ne peuvent rentrer en formation avec mon associé Vincent qu’après avoir signé un accord de non-divulgation et de non-concurrence dont le montant de la clause pénale est de 50 000 000 d’euros !
On imagine souvent les agents immobiliers comme des « tchatcheurs », finalement assez loin de l’image du notariat. Comment abordes-tu tout l’aspect commercial du métier ?
Déjà, tu imagines très bien d’après moi ! J’ai beau faire le zozo sur les réseaux sociaux, je n’ai aucune formation commerciale. Par exemple, j’ai appris ce qu’était la notion de « traitement des objections » il y a quelques semaines. Tu vois à peu près le niveau !
Ayant, pour la plupart d’entre nous, reçu pour seule formation un enseignement juridique, et n’ayant eu d’expérience professionnelle que dans le notariat, est-ce qu’on a vraiment le choix des armes pour nous battre dans la jungle qu’est le marché de la transaction immobilière en France ? Comme l’a dit Einstein, « Si vous jugez un poisson à sa capacité à grimper aux arbres, il passera sa vie à croire qu’il est stupide ». De la même façon, le diplômé notaire a-t-il vraiment intérêt à évaluer sa valeur et ses compétences à sa capacité à être un bon commercial ? Je pense que s’il s’y risque, il va droit vers la dépression.
De l’autre côté, l’arme commerciale, dans le monde de la transaction immobilière, nous apparaît non seulement inutile, mais même dangereuse. D’abord pour soi, et surtout pour les clients vendeurs et acquéreurs.
Et franchement, tu penses vraiment que je me serais dirigé vers la profession de notaire si j’étais un « tchatcheur » ? Donc, puisque je n’ai pas cette « capacité », et que je m’en sors malgré tout, j’ai bien compris qu’elle n’était ni nécessaire ni même souhaitable, surtout dans le Réseau A.D.N. Chez nous, pas de pression commerciale, ni en interne ni avec nos clients bien sûr. D’ailleurs, lorsque nous sélectionnons nos candidats, nous nous assurons que tout cela leur est vraiment étranger. Nous cherchons tout sauf des commerciaux, ces profils étant systématiquement écartés.
J’aurais tellement à te dire, mais je préfère appliquer une leçon apprise de mon associé : « Sous-promettre et sur-délivrer ».
Tu es pas mal présent sur les réseaux sociaux. Qu’est-ce que ça t’apporte ?
Ce qui était à la base un début de tentative de communication personnelle s’est vite transformé en bannière de ralliement pour tous ceux de notre « espèce ». De fil en aiguille, sont venus à moi mon associée Mélissa puis Vincent, et après un temps d’acclimatation réciproque, c’était parti pour la grande aventure du Réseau A.D.N.
Je n’imaginais pas un seul instant où cela allait me mener, mais avec ce que je sais aujourd’hui, franchement, j’aurais commencé beaucoup plus tôt !
Sur tout le mois d’août, j’ai participé à un défi organisé par Stan LELOUP et toute l’équipe de Marketing Mania : publier une vidéo d’une minute par jour, pendant 30 jours, sur YouTube, Instagram, TikTok et LinkedIn ! C’était un vrai délire, mais en même temps une charge de travail énorme pour tout prévoir et préparer en amont. C’était une aventure ponctuée de couacs de tournage, saupoudrée d’effets spéciaux à la Kaamelot, saison 1. Pour un défi, ça c’en était un : tâcher de produire des vidéos de qualité alors que je suis juste un amateur éclairé… !
En une minute, le contenu se doit d’être percutant, c’est le format qui l’impose. Alors là, tu peux dire au revoir à la nuance, pourtant si chère au juriste et à l’ancien notaire que je suis. Malgré mon absence de formation commerciale, j’ai essayé de proposer un format pédagogique tout en étant divertissant. Et comme je ne peux pas m’empêcher de le faire, il y a aussi de vraies questions, celles qui dérangent. Mais c’est peut-être à ce prix-là que nous réussirons à faire bouger les lignes.
Peux-tu nous raconter ton plus beau souvenir en tant qu’agent immobilier ?
Je crois bien que c’est la réflexion d’un jeune homme que nous accompagnons dans la vente d’une maison dont il a hérité en partie à la suite du décès de sa maman. Là, malheureusement, le notaire en charge de la succession a été plus que léger dans l’attestation de propriété. La désignation se résume à « Une maison à usage d’habitation ». Alors que les parents de mon client avaient acquis le terrain à bâtir dans un lotissement.
Mais heureusement, il a été bien inspiré de venir nous voir suffisamment en amont dans son projet de vente, sans attendre d’être dans la précipitation et dans le besoin de vendre immédiatement. Mon équipe et moi avons été mis en mesure de mener un vrai travail d’investigation pour retrouver notamment le permis de construire, la déclaration d’achèvement des travaux et le certificat de conformité, et bien évidemment tout ce qui avait trait au lotissement. À sa demande, il a souhaité effectuer certaines démarches seul avec notre appui technique. Et en sortant de la mairie, pour demander à faire ressortir des archives les documents nécessaires, il a prononcé cette phrase qui me fait dire que les mentalités sont prêtes au modèle que nous proposons : « Mais… Aucun agent immobilier n’aurait fait ce que vous êtes en train de faire pour moi, seul un agent diplômé notaire en est capable ».
À l’inverse, quelles sont les principales difficultés que tu as rencontrées depuis que tu t’es reconverti ?
Très clairement : les prises de conscience et les phases de deuil qui s’en sont suivi.
La première, c’est la prise de conscience que mon diplôme de notaire n’était pas un sésame pour l’immobilier. Malheureusement, mes compétences techniques, à peu près tout le monde s’en fout et tout le monde n’a pas les bons capteurs pour « apprécier » leur valeur et leur intérêt concurrentiel.
Deuxièmement : l’état lamentable de l’organisation du marché de la transaction en France. Le marché étant gangrené par des pratiques d’un autre âge, comme celle consistant à percevoir des rétrocommissions de la part des courtiers en prêt immobilier.
La troisième difficulté, c’est que le cerveau du grand public est farci d’âneries à cause des émissions d’un animateur « sympa ». Or, « sympa », ce n’est toujours pas un métier, et nous, ça nous dessert pas mal.
Avec mes associés, on a eu une prise de conscience qu’il fallait bien que l’un de nous se colle aux fonctions de représentation du réseau A.D.N. Et du fait de mon profil, comme tu l’as souligné, exposé sur les réseaux sociaux, il semble que j’étais tout désigné ! Et puisque je ne peux pas me dédoubler – contrairement à Double Vasque – il m’a fallu faire le deuil de mes ambitions personnelles dans ma propre agence pour le bien du Réseau A.D.N. Et c’est d’ailleurs pour ça qu’actuellement je cherche deux associés, au moins, pour m’aider à reprendre le développement de mon agence.
Quel message souhaites-tu faire passer à ceux qui, peut-être, hésitent à passer le cap et à se lancer dans l’immobilier ?
Déjà, quand il y a un doute, c’est qu’il n’y a pas de doute ! Pour finir cette interview, je vais vous raconter une histoire – celle de la phase de sélection des apprentis « Compagnons du Devoir » ou on dit aussi « Compagnon du Tour de France ». Il existe en France, depuis le Moyen-âge – comme le notariat d’ailleurs – l’Association ouvrière des Compagnons du Devoir et du Tour de France. Si vous voulez mon humble avis, c’est d’ailleurs avec le notariat, l’un des plus beaux fleurons de notre pays.
Les apprentis doivent être âgés de moins de 25 ans pour postuler et lorsqu’ils sont accueillis sur leur premier chantier, on ne leur donne que les deux instructions suivantes : « La ferme » et « Ne touche à rien ». Entre ennui, impatience ou autre sentiment d’inutilité voire de rejet, les rangs des apprentis s’éclaircissent bien vite. Les anciens sont là, patients, ce sont de vrais artisans, ce qui se fait de meilleur. Ils savent que « Le bel ouvrage prend du temps ». Ça aussi, ça ne te rappelle pas un peu le notariat ?
Lorsqu’il n’en reste qu’un ou deux, ils attendent encore. Pour un profane, c’est incompréhensible et peut apparaître comme une « perte de temps » . Là encore, ça doit ressembler à la vision qu’ont les gens du notariat. Mais rien n’est moins vrai, et comme je suis à Bordeaux, c’est comme le bon vin, il doit passer par un temps de maturation.
Un jour, l’apprenti n’en peut plus et hurle sa rage de vouloir tenir ses outils et de se colleter à la matière. C’est son rêve, il a le feu intérieur, ça le dévore, il n’en peut plus, il faut que l’intelligence de ses mains trouve son chemin. Donc, comme tout jeune qui se respecte, il se fait entendre…
C’est une situation impensable dans le notariat où tout est verrouillé, feutré et « cela ne se fait tout simplement pas ». C’est à ce moment-là que tous les compagnons présents semblent prendre conscience de sa présence et viennent le féliciter alors même que l’apprenti vient de déverser sur eux toute la frustration accumulée pendant des mois.
Et là, le temps, c’est le tamis, et une fois le diamant brut révélé – le jeune apprenti de notre histoire – les anciens vont le façonner et en faire un diamant taillé de toute beauté. Donc, si cette histoire te parle – dans tes tripes – et que ce feu intérieur, tu penses l’avoir, nous avons la chance d’avoir un Maître artisan qui pourrait faire de toi un diamant taillé.
Mais, comme je ne suis pas là pour te vendre du rêve, dis-toi bien que pour tailler un diamant, il faut forcément qu’il perde de la matière afin de révéler sa beauté. Donc si tu viens, tu devras, malgré ton âge, tes diplômes et tes compétences, déposer tes certitudes à l’entrée de ta formation.
Et j’espère, au plus profond de moi, que l’amour que mettent ces Compagnons du Devoir à accomplir leur art, tu le mettras aussi dans ton nouveau métier qu’est celui d’Agent A.D.N.
Et comme il y a des artisans en France et les Compagnons du Devoir, j’ai la farouche ambition que nos clients diront un jour : « Il y a des agents immobiliers et il y a les Agents A.D.N ».