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Douter de sa légitimité en tant que notaire ou clerc de notaire : le syndrome de l’imposteur


« Un jour, ils réaliseront que je n’ai pas le niveau. », « J’ai eu de la chance. », « Ils me font des compliments pour être gentils avec moi. ». Si ce genre de phrase vous parle, alors vous ressentez probablement parfois ce qu’on appelle le syndrome de l’imposteur. Et vous n’êtes pas le seul. On estime qu’entre 62 et 70 % de la population douteraient un jour ou l’autre de la légitimité de son statut professionnel ou de son succès. Dans les études notariales où les responsabilités sont importantes, il est fréquent de voir des collaborateurs et des notaires souffrirent de ce sentiment désagréable. Décryptage.



« Le syndrome de l’imposteur », de quoi on parle ?


Le syndrome de l’imposteur a été identifié pour la première fois en 1978 par deux psychologues américaines, Pauline Rose Clance et Suzanne Ament Ines. Il se traduirait par trois points essentiels :

  • Le sentiment de tromper son monde en se percevant comme une fraude, un imposteur.

  • Un sentiment de peur et d’anxiété plus moins intense à l’idée d’être démasqué,

  • Un biais cognitif poussant à toujours mal attribuer ses réussites (à de la chance, à un jugement erroné des tiers, à de la sympathie,…)


Selon Emouna Lilti, psychologue du travail, ce syndrome de l’imposteur peut s’expliquer par une montée en compétence. « Lorsqu’on commence une nouvelle activité, nous n’avons pas conscience de la difficulté des tâches. En sortant de votre premier cours de conduite, vous n’aviez pas conscience qu’on vous avait aidé avec des pédales, des instructions, et que c’était très différent de ce qu’est vraiment la conduite. Vous avez dû penser que c’était facile. Dans le monde professionnel, c’est pareil. La prise de conscience de tout ce que vous ne maitrisez pas encore peut-être écrasante. Souvent, le syndrome de l’imposteur peut apparaitre à ce moment. ». D’après elle, cela signifie qu’on devient un expert, c’est donc une phase d’incompétence consciente. En ce sens, c’est parfois un sentiment positif puisqu’il permet d’identifier les compétences manquantes. Ce n’est pas pour rien qu’Aristote aurait dit « Plus vous en savez, plus vous savez que vous ne savez pas ».


Les personnes souffrant de ce syndrome vont avoir tendance à éprouver une grande anxiété face à de nouvelles taches. Des pensées négatives liées à la perception faussée qu’elles ont de leurs compétences et leur peur de l’échec vont émerger. Il n’est pas rare qu’en réaction, ils se « sur-préparent » sur le long terme afin de maximiser leurs chances de succès et ainsi palier ce sentiment d’illégitimité.


Lire aussi : Témoignage : «Je suis associée dans l’étude où j’étais notaire stagiaire.»



Le notariat, un terreau fertile pour ce genre de sentiment


Que l’on soit collaborateur ou notaire, le quotidien du métier nécessite de savoir conseiller les clients. Selon Emouna Lilti, le syndrome de l’imposteur peut être lié à cette grande responsabilité. En effet, les collaborateurs et les notaires ont une expertise juridique très précise sur certains sujets (successions, achat immobilier, donations pour n’en citer que trois) mais ils n’ont pas forcément déjà eu l’expérience de vie correspondante. Il est ainsi possible d’être responsable du pôle successions de son étude sans n’avoir jamais eu à traverser un deuil. Selon elle, les « jeunes » professionnels attendent d’être légitimes pour s’exprimer sur certains sujets. Face à une situation à laquelle ils n’ont jamais été personnellement confrontés, ils se sentent alors illégitimes. Or, elle estime que nous avons tendance à oublier que les autres ne maitrisent pas les mêmes compétences que nous. « Ce qui est naturel pour nous ne l’est pas pour les autres. ». À se concentrer sur les expériences que nous n’avons pas vécues, nous oublions ainsi les compétences fondamentales que nous avons et qui sont tout aussi pertinentes.


Le syndrome de l’imposteur, Marie*, notaire assistante depuis 3 ans le connait bien : « Cest un sentiment que je connais dans dautres pans de ma vie. Au niveau du travail ça se traduit par des comparaisons récurrentes : je me compare à mes boss (est-ce que je suis à la hauteur ? Est-ce que, à mon niveau, ils faisaient mieux que moi ?), à mes collègues de même niveau dexpérience (« elle est plus rapide, elle sait faire ça et pas moi …») mais aussi aux plus jeunes (« moi je ne savais pas faire ça, il est déjà hyper fort etc. »). Ça peut être relatif aux connaissances, à la rapidité de production des actes, à laisance orale. Cest un sentiment qui ressort particulièrement à lapproche d’évènements spécifiques comme passer un entretien annuel ou postuler à un nouveau poste. Comme je mentends très bien avec mes boss, il marrive de penser qu’ils ne sont pas objectifs et qu’ils me font des compliments pour me faire plaisir ou me rassurer. »


D’après la psychologue Emouna Lilti, les personnes comme Marie* qui ont tendance à se comparer souffrent d’un biais. Elles ne croient pas, n’arrivent pas à imager que leurs supérieurs ont, eux aussi, évolués et n’ont pas toujours été à ce niveau. C’est pourquoi il est important d’avoir différentes sources d’inspiration : des experts, mais également des gens du même niveau que soi. Pour se rendre compte de la réalité de ce biais, interrogez-vous sur votre progression. Lorsqu’on débute dans un secteur, l’apprentissage est exponentiel. Pourtant, on oublie souvent tous les progrès déjà réalisé. N’oubliez pas que lors de vos premiers jours à l’étude, vous avez dû apprendre à gérer le logiciel de rédaction avant de tramer votre premier acte.


« Je ne sais pas si jirais jusqu’à refuser une promotion à cause de ce syndrome de l’imposteur, mais cest possible ! » Marie*

Trucs et astuces pour déconstruire ses croyances limitantes


Pour lutter contre ce sentiment d’illégitimité, il est important d’identifier ses différentes émotions et les pensées qui y sont associées. Pour cela, vous pouvez vous poser des questions ouvertes : « Qu’est-ce qui me fait dire que je ne mérite pas une augmentation ? Pourquoi est-ce que je ne me sens pas capable de demander ma nomination comme notaire salarié ? ». Tout l’enjeu est d’être objectif pour identifier les pensées réelles sur lesquelles on peut agir (ne pas avoir assez de clients, ne pas avoir assez eu un certains types de dossiers), et les croyances limitantes.


Les croyances limitantes sont des certitudes, acquises au fil du temps, résultant de certains traumatismes ou habitudes et qui freinent dans l’évolution.

Il faut ensuite chercher à progresser sur chacune de ces croyances limitantes, en comprenant d’où elles viennent, ou en cherchant à les faire évoluer peu à peu, sans aller complètement à l’opposé.


De plus, la reconnaissance s’acquiert dans le monde professionnel, mais on peut aussi aller la conquérir. Une part de la légitimité ne s’acquiert pas en travaillant sur ses pensées. Il est également nécessaire d’être reconnu par nos pairs pour se sentir compétent. En effet, on peut être très bon juridiquement, ou avoir un bon contact avec les clients, si personne le ne voit à l’étude, on se sentira toujours illégitime. Pour cela, il est nécessaire de faire entendre sa voix pour aller gagner sa légitimité. Aujourd’hui grâce aux réseaux sociaux, il est possible de devenir son propre média, d’informer son réseau de ses réflexions. Vous pouvez aussi prendre la parole dans certains magazines spécialisés, mettre en avant vos spécialités ou vos appétences (peut-être que votre dada, ce sont les baux réels solidaires ? Alors parlez-en !) ou chercher à vous inspirer de personnalités de premier plan. En pratique, les compétences et le réseau professionnel sont indissociables, alors ne misez pas tout sur l’un exclusivement !


Enfin, gardez bien en tête que vous n’êtes pas le seul dans cette situation. Dédramatiser ce sentiment, l’accepter et en parler librement vous permettra de vous soulager d’un poids mais aussi de relativiser. En revanche, si vous sentez que ce symptôme prend trop de place dans votre vie professionnelle, n’hésitez pas à consulter un psychologue qui saura vous aider.


Le travail doit être source d’épanouissement, pas de souffrance, alors prenez-soin de vous !


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